Dans une interview accordée à la presse, le génie précurseur du 7ème art africain, Dieudonné Mwenze Ngangura a décrypté l’évolution de l’industrie cinématographique dans le continent noir. 72 ans d’âge, ce grand réalisateur congolais a profité de l’occasion pour partager son expérience et donner quelques conseils à la génération du cinéma.
En ce qui concerne sa lecture sur l’évolution des cinémas africains depuis ses débuts et son avenir, Dieudonné NGANGURA estime que les cinéastes qui ont précédé sa génération voulaient raconter l’Afrique avec un côté un peu donneur de leçons.
‘‘Je crois qu’ils se sentaient investis d’une mission, celle de conscientiser leurs peuple aux problèmes du développement, à la lutte anti-coloniale, à l’image de Sembène Ousmane’’, a-t-soutenu.
Il reconnait qu’à leur époque, les cinéastes de sa génération ne se sentaient plus cette responsabilité, mais plutôt l’envie d’aller à la rencontre de nos spectateurs en Afrique.
‘‘Parce que le cinéma africain étant essentiellement financé en Europe, il nous semblait devoir nous reconnecter avec les publics sur place, ce qui était rendu compliqué par le fait qu’il n’y avait pas vraiment de circuits de distribution. La question pour nous, c’était: « Pour qui filme-t-on? Et pour quelle diffusion? Comment amener nos films vers notre public?»’’, s’interroge le doyen NGANGURA.
Et d’ajouter : « Récemment, j’ai rencontré un jeune Congolais qui vit à Paris, qui produit actuellement son film avec des financements de Canal Plus et de sociétés françaises. Il fait un cinéma que je décrirais comme métissé, capable de parler aussi bien aux publics européens qu’africains »
Cependant, cette icône du 7ème art crois qu’il faut considérer qu’entre sa génération qui essayait de se couper du passé militant du cinéma africain, et de faire un cinéma peut-être trop fermé sur l’Afrique, et les jeunes générations, la différence, c’est la volonté de toucher un public résolument international.
‘‘Il n’y a plus d’obsession d’écrire l’histoire du cinéma africain pour le public africain. Il faut que les jeunes générations évitent le piège d’un cinéma qui serait trop exotisant. Il leur faut absorber et s’approprier les codes du cinéma tout court, d’où qu’ils viennent. On a longtemps échafaudé des théories sur ce que doit ou ne doit pas être le cinéma africain, mais c’est une perte de temps. Il faut juste se donner les moyens de faire des films pour tous. Cet exotisme dans lequel les cinéastes africains avaient tendance à s’enfermer, je pense que c’est un obstacle à l’éclosion d’un vrai cinéma africain, mature et durable’’, a déclaré le génie MWENZE NGANGURA. »
Toutefois, il appelle les jeunes cinéastes africains à esquiver le piège de l’exotisme pour proposer un cinéma universel.
Résidant en Belgique, Mwezé Ngangura est l’auteur de plusieurs courts et longs-métrages, tantôt fictionnels, tantôt documentaires. Très populaire dans l’Afrique francophone, son œuvre narre l’histoire de son pays d’origine, porte à la loupe l’émigration africaine et illustre la transversalité de la musique.
Signalons que le réalisateur congolais est réalisé du film La vie est belle » avec son ami Benoit Lamy en 1987 dont l’acteur principal n’était autre que le Kuru Papa Wemba, une légende de la Rumba congolaise. Plus de 50 ans dans le cinéma, Mweze Ngangura est patron de sa propre société de production, « Sol’Oeil Films» en Belgique où il poursuit sa carrière en international.
Jordache DIALA
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