Civisme fiscal : Qu’est-ce qui pousse les particuliers et les entreprises à payer des impôts ?
La question a sa raison d’être posée car, le civisme fiscal se définit comme l’acceptation des contribuables à se conformer volontairement à leurs obligations fiscales, nonobstant la crainte des sanctions.
Libérer ce qui motive la morale fiscale – la volonté intrinsèque de payer des impôts – peut grandement aider le gouvernement Congolais dans la conception des politiques fiscales et son administration, en particulier dans notre pays où les taux de conformité sont faibles.
Cette enquête s’appuie sur des recherches antérieures des plusieurs experts pour identifier certains des principaux moteurs socio-économiques et institutionnels du civisme fiscal en République Démocratique du Congo, et cherche à tester les preuves du contrat social en examinant l’impact des services publics sur le civisme fiscal. Elle utilise également de nouvelles données sur la certitude fiscale comme point d’entrée pour explorer la morale fiscale dans les entreprises, où la recherche existante est très limitée.
Enfin, cette enquête identifie une série de facteurs liés au système fiscal qui peuvent influer sur la prise de décision des entreprises, la façon dont ils varient d’une province à l’autre, et suggère certains domaines de recherche future. Dans l’ensemble, l’enquête fournit une série de suggestions pour des travaux futurs et indique comment les considérations de civisme fiscal peuvent être intégrées dans des stratégies holistiques de conformité fiscale.
Les Congolaises et les Congolais peuvent bénéficier d’une meilleure compréhension de ce qui motive les contribuables à participer et à se conformer au système fiscal.
Accroître ces connaissances peut donner une impulsion à la conception de systèmes fiscaux plus efficaces et réactifs qui augmentent la conformité fiscale volontaire.
Ainsi, bien que cette enquête se concentre principalement sur des considérations de développement, les conclusions et les recommandations sont susceptibles d’intéresser un plus large éventail des pays et des parties prenantes.
Cette enquête se concentre sur notre pays, étant donné que plusieurs experts dans leurs études ont clairement indiqué la nécessité de soutenir une Gestion de la Relation Clientèle plus efficace et plus efficiente, ici nous faisons référence aux différents ateliers animés par le Chef de Division en communication Jean Muteba aux agents de la DGI.
La Gestion des Relations-Clients est au cœur du financement du développement et les recettes fiscales sont la principale source de financement à tous les niveaux de développement.
Avec un déficit de financement, les experts soulignent la nécessité d’une focalisation sur la manière de maximiser la contribution de la Gestion des Relations avec la Clientèle pour combler le déficit de financement.
À ce jour, le Gouvernement que dirige Jean-Michel SAMA LUKONDE s’est principalement concentré sur la politique fiscale nationale et le renforcement des capacités des administrations fiscales.
Depuis la crise financière mondiale de 2008, une attention particulière a été accordée aux questions de politique fiscale, associées à l’évasion fiscale transfrontalière.
Cela a conduit à une gamme de nouveaux outils, normes et approches pour relever les défis de la richesse off-shore non-déclarée par les particuliers, et de la planification fiscale agressive par les multinationales.
Parallèlement à ces nouveaux mécanismes qui offrent un potentiel considérable pour notre pays, la République Démocratique du Congo, l’accent a été mis davantage sur la mise en place et la mesure des éléments constitutifs d’administrations fiscales efficaces.
En revanche, la compréhension et l’amélioration de la morale fiscale sont deux piliers majeurs.
La morale fiscale, généralement définie comme la motivation intrinsèque à payer des impôts, est un aspect essentiel du système fiscal, car la plupart des systèmes fiscaux reposent sur la conformité volontaire des contribuables pour l’essentiel de leurs revenus.
L’amélioration du civisme fiscal recèle donc le potentiel d’augmenter les recettes fiscales en faisant appel à des mesures d’exécution (relativement) restreintes.
À court terme, ce potentiel peut être réalisé en grande partie grâce à des approches économiques comportementales, tandis qu’à long terme, des changements plus structurels sont nécessaires pour renforcer la confiance et la légitimité des contribuables. Compte tenu de ce potentiel, il est surprenant que la morale fiscale ait reçu relativement peu d’attention.
Cette enquête se concentre spécifiquement sur la morale fiscale dans notre pays la République Démocratique du Congo, en utilisant des nouvelles sources de données pour identifier certains de ses moteurs et dynamiques. Une meilleure compréhension des facteurs qui influencent la perception qu’ont les contribuables du système fiscal et leur volonté de payer des impôts est le point de départ d’une amélioration du civisme fiscal. Ce rapport utilise des données récentes pour aider à identifier les moteurs de la morale fiscale chez les particuliers et les entreprises, bien que les données aient des limites, en particulier dans les pays en développement, de sorte que des aspects importants tels que la façon dont les perceptions de l’équité du système fiscal affectent la morale fiscale pourraient pas être testé. Cela peut être un domaine précieux pour les recherches futures au fur et à mesure que les données seront disponibles.
Ce chapitre analyse les données d’enquêtes mondiales et sur un échantillon des Congolais, où le volume élevé des répondants permet une interrogation plus approfondie grâce à une analyse micro-économétrique.
Citoyenneté fiscale chez les particuliers
Le civisme fiscal est généralement plus élevé dans les pays qui taxent plus lourdement comme la Belgique.
Bien qu’il existe des variations substantielles entre les pays, la tendance générale est que les pays ayant des ratios impôts/produit intérieur brut (PIB) élevés ont une moralité fiscale plus élevée. Cela peut être le signe d’un cercle vicieux entre une performance gouvernementale efficace, une morale fiscale plus élevée et une conformité fiscale volontaire (ainsi qu’une application efficace) ; ou la preuve d’un contrat fiscal entre les contribuables et l’État (une volonté de payer des impôts par les citoyens en échange de services publics efficaces. L’analyse au niveau des provinces permet de tester davantage cette dynamique.
Des nouvelles données provenant d’enquêtes sur la perception du public confirment les conclusions précédentes selon lesquelles l’âge, l’éducation, le sexe, la religion et la confiance dans le gouvernement semblent tous influencer la moralité fiscale.
La comparaison de la nouvelle analyse avec l’analyse précédente d’il y a quelques années montre que bon nombre des mêmes facteurs semblent influencer la morale fiscale.
Les individus plus âgés, plus éduqués ou religieux ont tous, des niveaux systématiquement plus élevés de civisme fiscal au niveau mondial, tout comme les femmes en général.
Ceux qui ont une plus grande confiance dans le gouvernement ont également une morale fiscale plus élevée. Ces résultats sont répétés dans l’analyse dans plusieurs pays.
Alors qu’au niveau mondial, les femmes ont une morale fiscale plus élevée que les hommes, en République Démocratique du Congo, on constate qu’elles ont une morale fiscale plus faible.
Les raisons de ce contraste ne sont pas claires et les résultats soulignent la nécessité de poursuivre les recherches sur le genre et la fiscalité (pas seulement sur la morale fiscale), y compris sur des aspects tels que la manière dont les soins non-rémunérés sont traités dans le système fiscal et les différences d’imposition entre les femmes et les hommes.
_Ces recherches sont actuellement entravées par un manque de données ventilées par sexe.
Des données plus détaillées, actuellement disponibles uniquement pour la République Démocratique du Congo, montrent que la qualité perçue de l’administration fiscale est un déterminant clé de la morale fiscale. Les résultats de l’enquête montrent que la légitimité perçue de l’autorité fiscale est le déterminant le plus important de la morale fiscale en République Démocratique du Congo.
Les données Congolaises mettent en évidence le lien positif entre le civisme fiscal et la prestation des services publics._
La République Démocratique du Congo a montré une amélioration de la morale fiscale liée à la satisfaction à l’égard des services publics, soutenant l’existence du contrat fiscal.
Cette relation était moins évidente avant, d’où la confiance dans le gouvernement était importante pour l’année 2021.
La morale fiscale dans les entreprises
Avec des preuves limitées sur lesquelles s’appuyer, les opinions des entreprises sur la sécurité fiscale dans notre pays ont été utilisées comme approximation de la morale fiscale.
Les facteurs susceptibles d’influer sur le civisme fiscal varient entre les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises multinationales (EMN).
Alors que les PME peuvent refléter les résultats pour les particuliers, la taille et la complexité accrues des EMN sont susceptibles de rendre le tableau de la moralité fiscale plus complexe également.
_Ce rapport se concentre sur la morale fiscale dans les EMN, car les EMN sont particulièrement importantes dans les systèmes fiscaux des pays en voie de développement, représentant une part importante de l’assiette fiscale.
Pour remédier au manque des données sur les EMN, une enquête sur la sécurité fiscale a été utilisée comme indicateur indirect de la morale fiscale dans les EMN._
La sécurité fiscale semble être un élément clé de la morale fiscale.
En termes simples, lorsque les entreprises multinationales perçoivent une faible certitude fiscale, elles peuvent être moins susceptibles de participer activement ou positivement au système fiscal (ou du moins dans les parties les plus incertaines).
La certitude fiscale semble avoir un impact plus important sur les décisions des entreprises dans les pays en développement que dans les pays de l’OCDE, entendez l’OCDE comme Organisation de Coopération et de Développement Économique, qui est une _Organisation internationale spécialisée dans les études économiques, dont les membres (des pays développés pour un bon nombre) ont en commun un système de gouvernement démocratique et une économie de marché.) ; ce qui entraîne des modifications des structures des entreprises, une augmentation des coûts et des changements dans les décisions d’investissement._
Il a été constaté que l’incertitude fiscale affectait beaucoup plus fréquemment les décisions des entreprises dans les pays en développement que dans les pays membres de l’OCDE.
Les impacts de cela varient, mais comprennent une augmentation des coûts d’investissement, des changements dans la structure de l’entreprise ou même une réduction ou un changement de localisation de l’investissement.
Ainsi, alors que d’autres études ont clairement indiqué que la fiscalité détermine rarement si une entreprise investit ou non dans un pays spécifique, la certitude fiscale peut encore avoir des impacts significatifs sur exactement où, comment et combien d’investissements sont réalisés.
Avec quelques variations régionales, la fiscalité internationale et la relation entre les autorités fiscales et les entreprises sont des préoccupations constantes dans tous les pays en développement.
Il n’est peut-être pas surprenant que, pour une enquête portant principalement sur les entreprises multinationales, les aspects internationaux de la fiscalité aient été une préoccupation élevée et persistante, soulignant l’avantage d’adopter des normes internationales en matière de fiscalité, ainsi que la nécessité de renforcer les capacités en matière de fiscalité internationale.
Ailleurs, les inquiétudes portaient généralement sur la régularité du traitement, ou sur la capacité à obtenir certains résultats (secours/remboursements/décisions).
Dans l’ensemble, ces cas peuvent être considérés comme des problèmes de confiance ; ce qui suggère que la confiance entre les contribuables et les autorités fiscales est susceptible d’être un élément clé de la morale fiscale des EMN.
Prochaines étapes
Les conclusions de notre enquête, identifient un certain nombre de domaines que les décideurs politiques doivent prendre en compte, et pour des recherches plus approfondies.
En ce qui concerne à la fois les particuliers et les entreprises, il existe un certain nombre de domaines, en particulier pour soutenir le développement ultérieur des administrations fiscales, où les conclusions de cette enquête soutiennent l’intensification, et les adaptations possibles, des efforts existants.
Au-delà de ceci, il existe un certain nombre de domaines prometteurs pour des recherches supplémentaires afin d’approfondir la compréhension des modèles identifiés dans cette enquête, et pourraient aider à intégrer les considérations de civisme fiscal dans des objectifs de développement plus larges.
Compte tenu des variations observées dans ce rapport et des interactions complexes entre la morale fiscale et d’autres facteurs de conformité fiscale, il sera essentiel que les travaux ultérieurs examinent le niveau national (ou infranational) et le rôle d’autres facteurs, parallèlement à la morale fiscale.
Des considérations politiques
Soutenir les programmes d’éducation des contribuables – notamment en intégrant la recherche et l’analyse de la moralité fiscale dans les programmes.
Soutenir le développement des administrations fiscales – en particulier en améliorant la facilité de paiement des impôts.
À plus long terme, chercher à renforcer les liens recettes-dépenses pour établir le contrat social – en faisant preuve de prudence avant d’introduire des impôts hypothéqués.
Entreprises (en particulier les multinationales):
Continuer à développer le renforcement des capacités des administrations fiscales – en accordant une attention particulière à la fiscalité internationale, à la TVA et aux systèmes de retenue à la source.
Libérer l’expérience et l’expertise d’autres administrations fiscales peut jouer ici un rôle précieux.
Élargir l’engagement des entreprises dans le renforcement des capacités des administrations fiscales – pour renforcer la compréhension des processus et des structures des entreprises.
De plus amples recherches
Personnes
Une analyse plus approfondie au niveau de notre pays, y compris des enquêtes, pour identifier les moteurs de la morale fiscale au niveau local et infranational, et leur relation avec d’autres facteurs de conformité.
Approfondir la compréhension des moteurs et des composantes de la confiance dans le gouvernement.
Accroître la recherche et les données disponibles sur notre pays la République Démocratique du Congo, en particulier sur la fiscalité et le genre.
Entreprises
Identifier d’autres approches et sources des données pour mesurer la morale fiscale dans les entreprises de toutes tailles.
Développer des recherches au niveau provincial pour identifier les principaux problèmes affectant la morale fiscale dans différents types d’entreprises (taille et secteurs).
Entreprendre d’autres recherches pour comprendre l’impact d’autres composantes de la morale fiscale pour les entreprises – par exemple, la déclaration des meilleures pratiques fiscales de l’OCDE sur les entreprises pour les relations avec les autorités fiscales du pays.
Identifier l’influence sur la moralité fiscale des personnes clés de l’entreprise (par exemple, les membres du conseil d’administration, le DG, les cadres supérieurs de la fiscalité) et les influences externes, y compris les conseillers fiscaux.
Maintenant plus que jamais, la Direction Générale des Impôts dirigée par Barnabé Muakadi Muamba multiplie les efforts afin de percevoir davantage de recettes fiscales intérieures.
Pour ce faire, elle se tourne de plus en plus vers les contribuables – ceux d’aujourd’hui et ceux de demain – afin de les informer et de les mobiliser.
Son objectif est de favoriser l’émergence d’une culture du civisme fondée sur les droits et les responsabilités, culture en vertu de laquelle chaque citoyen considèrerait que le paiement des impôts est une composante à part entière de la relation qu’il entretient avec la puissance publique.
De ce point de vue, l’éducation des contribuables est une passerelle entre l’administration fiscale et les citoyens et un outil de transformation de la culture fiscale.
Cette enquête présente des stratégies novatrices dans notre pays la République Démocratique du Congo afin de fournir des idées et de l’inspiration pour l’éducation des contribuables, l’éducation fiscale et la sensibilisation.
Elle aide les autorités fiscales, particulièrement le Directeur Général Barnabé Muakadi Muamba ainsi que ses deux adjoints Abdon Etina Ipan et Maurice Kabwa Kalume à renforcer le moral fiscal et le civisme fiscal de leurs citoyens.
Vous comprendrez que s’il reste à se mobiliser pour le retour d’une conscience fiscale du contribuable, un focus plus étendu sur le civisme fiscal débouchera sur une meilleure discipline fiscale volontaire, pour un système fiscal juste et équitable en faveur de tous les contribuables.