*Didier KEMBOLA alias ‘‘Didi Kembwarss’’ est un artiste chanteur-parolier, écrivain, penseur et auteur des pièces de théâtre. Résidant en France, ce créateur congolais est parmi les musiciens qui ont initié et signé la lettre ouverte qui a été adressée au Président de la République Félix Antoine TSHISEKEDI (FATSHI). Au cours d’une interview exclusive accordée au site panafricain ‘‘Afrique info Magazine, KEMBWARSS a tenu à expliquer avec pertinence les raisons majeures de leur correspondance envoyée à FATSHI. Ce compatriote de la diaspora a profité également de l’occasion pour exprimer son opinion par rapport aux enjeux politiques de l’heure dominés par les élections en République Démocratique du Congo.
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Afrique Info Magazine(AIM) : Vous faites partie du regroupement « Les Amis de la culture musicale congolaise (ACMC) qui vient d’adresser une lettre ouverte au chef de l’Etat Félix TSHISEKEDI. Que peut-on retenir d’abord de votre structure et quels sont ses objectifs ?
Didi KEMBWARSS : ACMC est un collectif qui regroupe des artistes musiciens et d’autres opérateurs culturels en RDC et dans la diaspora. Les amis de la culture Musicale est un groupe de réflexion dont l’objectif est de débattre sur des sujets culturels. L’objectif est de mettre en lumière ce qui ne va pas, de trouver les raisons et de formuler des suggestions pour améliorer les choses. La situation dans le domaine culturel est chaotique et cela dure depuis de nombreuses années, dans ce collectif, nous ne voulons pas seulement critiquer mais faire des propositions, apporter des solutions aux maux qui gangrènent le secteur de la culture dans notre pays.
AIM : De quoi porte essentiellement votre lettre en termes de contenus ?
DK : Il faut souligner que par cette lettre ouverte, nous tenons à remercier le chef de l’État, le Président de la République, nous exprimons notre gratitude pour la décision qu’il a prise, de l’organisation du Forum national de la culture, nous sollicitons son implication pour apporter des solutions aux nombreux dysfonctionnements dans le secteur culturel, nous souhaitons que cette fois ci, le forum de la culture apporte des vrais changements, avec une participation, la plus large possible. Il est crucial que la justice nous informe sur les détails des répartitions des 25 millions de dollars versés par l’État pour achever la liquidation de la Société nationale des éditeurs et auteurs-compositeurs (SONECA). Nous sollicitons l’intervention du président de la République afin de mettre un terme aux conflits qui persistent à la Société congolaise des droits d’auteurs et droits voisins (SOCODA). En résumé, voici ce que je peux dire, mais il est préférable de lire la lettre.
AIM : Qui sont réellement les auteurs et signataires de cette missive ?
DK : Je suis l’auteur principal de cette lettre mais d’autres membres ont également contribué à son élaboration, on peut dire que nous l’avons écrite ensemble. Plusieurs artistes musiciens et opérateurs culturels ont apporté leur soutien à la lettre ouverte et l’ont signée, notamment : Shungu Omba ‘‘Nguma Lokito’’, Kembola Didi Kembwarss, Mbemba Ndombasi Godé Lofombo, Beya Wa Beya Bendoson, Christian Lema, Maïka Munan, Do Akongo Dikoel, Korino Sand Jomb, Manuaku Waku Félix, Bidensi Bidiampasi, Sec Bidens, Kizonga Elongo Christian, Ndombasi Lusende Golf Dikando, Loguylo Mabungu, Wonsa Ndolomingu petit Wendo, Pinos Tembo, Djodjo Ikomo, Jeannot ne Nzau Diop, Mokoko Mahuli Malisika Ceden Play, Yakini Kiese Christian Boss, Le bon Berger Struggling-Man, Niankala Maître Sampinu Lifuramba, Kalimwendo Messi Princesse Joss Kalim, West Ghenda, Natshiko Ntando Tsunami, Djodjo H Monga, Bibi Dens, Kibisi Douglas, Sandra Pongo, Kaki Akiewa et tant d’autres. La liste n’est pas exhaustive.
AIM : Pourquoi adressez-vous directement au chef de l’Etat alors que vous avez un ministère de tutelle ?
DK : Nous nous adressons au chef de l’État, son excellence monsieur FÉLIX ANTOINE TSHISEKEDI car il est le garant de la nation, sa volonté de demander l’organisation du forum de la culture, montre sa volonté de mettre de l’ordre dans ce secteur. La ministre de la culture a également reçu la copie de la lettre ouverte. Madame Catherine FURAHA KATUNGU, à la tête du ministère de la culture, est déterminée à travailler pour l’assainissement du secteur culturel en RDC, elle s’est engagée à suivre le parcours de la lettre ouverte jusqu’à ce que le chef de l’Etat puisse en prendre connaissance.
AIM : Le secteur droit d’auteur continue à balbutier jusqu’à tel point de maintenir la SOCODA dans un cycle infernal des crises entre les ayants droits. Avez-vous quelques remèdes à proposer aux dirigeants pour mettre fin à cette situation ?
DK : Cette situation suscite un manque de confiance chez la majorité des ayants droits et même chez les autres créateurs qui sont réticents à adhérer à la SOCODA. Cela complique leurs situations car jusqu’à présent, la SOCODA a le monopole de la gestion des droits d’auteur sur l’étendue du territoire.
AIM : Que faut-il faire concrètement ?
DK : En finir avec la répartition par forfait intégral, car elle est injuste. Il faut réduire le pourcentage du forfait, introduire le sondage et surtout mettre en place des fiches ou concevoir une application qui permette d’identifier précisément les œuvres utilisées dans différents lieux. Cela va permettre de rémunérer correctement les artistes concernés. Il est essentiel de rendre transparent le mode de calcul de la part du forfait afin que les ayants droits puissent comprendre pourquoi on alloue 1500 dollars à tel artiste et 200 dollars seulement à l’autre. Il est important de préciser si l’on considère, par exemple, le nombre de concerts joués à titre payant ou gratuit etc…Il est essentiel que la répartition par forfait soit basée sur des critères précis et qu’elle soit transparente. Pour moi, il est nécessaire de limiter le nombre de mandats à 2 et de ne pas dépasser 3 ans pour chaque mandat au niveau du conseil d’administration. L’alternance est une bonne chose, car elle oblige ceux qui sont aux commandes à mieux travailler pour éviter d’être jugés négativement par l’équipe suivante. Il faut promouvoir l’adhésion des autres artistes et créateurs. C’est inadmissible et choquant de voir les chiffres insignifiants des membres de la SOCODA dans un pays qui compte près de 100 000 000 habitants et plusieurs milliers d’artistes.
AIM : Qu’attendez-vous du Président de la République ?
DK : Nous voulons que le Président de la République ordonne que nos revendications, exprimées dans cette lettre ouverte soient prises en compte par les organisateurs du forum de la culture qui s’annonce pour le premier semestre de l’année 2024 à Kinshasa.
AIM : Que ferez-vous au cas où vos principales revendications ne sont pas prises en compte au Forum ?
DK : Il est peu probable que le Président de la république prenne connaissance de cette lettre sans agir. N’oublions pas que c’est lui qui a souhaité la tenue du forum de la culture. Il a pris cette initiative parce qu’il veut que la situation change. Le chef de l’Etat veut qu’on trouve des solutions à ces nombreux problèmes récurrents. En raison de notre désir aussi de trouver des solutions concrètes et durables, notre lettre ouverte s’inscrit également dans cette même direction. Nous faisons confiance à l’esprit des responsabilités du Président de la République pour que nos revendications soient associées à d’autres lors de prochain sommet sur la culture.
AIM : Le 20 décembre 2023, le peuple congolais ira aux urnes pour élire la personne qui va diriger le grand Congo-démocratique durant les 5 prochaines années. Quel est selon vous le meilleur profil parmi les 26 candidats à la présidentielle.
DK : Merci pour cette question ! Permettez-moi d’expliquer avant tout les raisons de mon choix. Le prochain Président de la République doit travailler pour le bien-être de la génération future. Il doit préparer ou commencer à préparer la RDC de 2030-2040. Aujourd’hui, on estime la population de la RDC à plus de 100 millions d’habitants et si on prend la ville de Kinshasa, c’est entre 15 à 16 millions d’habitants. En 2040, il est prévu que la population atteigne plus de 26 millions d’habitants dans la Capitale, comment les gens vont se déplacer, se loger, se soigner, travailler…? 2040, c’est loin, mais ça arrivera. Avec 26 millions d’habitants, si nous avons les mêmes infrastructures routières, les mêmes nombres d’hôpitaux… comment les kinois vont vivre en 2040 en étant plus nombreux si rien n’est fait maintenant ? J’ai utilisé l’exemple de la ville de Kinshasa, mais cela peut être étendu à l’ensemble du pays.
AIM : Etes-vous pour la continuité ou la rupture du régime FATSHI ?
Didi Kembwarss : Pour lancer des grandes réformes, pour préparer l’avenir dans la situation actuelle, il faut un président qui ne va pas se soucier de sa réélection, car il doit prendre quelquefois des décisions difficiles. Voilà pourquoi je choisis l’actuel chef de l’État, Félix TSHISEKEDI pour un second mandat, car c’est son dernier. Je mise sur sa capacité à mettre en œuvre les réformes nécessaires pour préparer le Congo de demain.
Propos recueillis par Jordache DIALA
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